LA CHOUANNERIE EN NORMANDIE

Après l’exécution de Louis XVI et une succession de décisions impopulaires comme la constitution civile du clergé, le mécontentement présent dans toute la France s’est mué, dans l’Ouest, en une série de révoltes dans lesquelles les monarchistes et les émigrés ont vu un moyen de déstabiliser le nouveau régime.

 

Ce mouvement, né dans l’est de la Vendée en 1793, s’est vite propagé au Maine-et-Loire, aux Deux-Sèvres et à la Loire-Atlantique, avant de prendre un nouveau visage et s’étendre à la Bretagne de 1795 à 1800 sous le nom plus connu de chouannerie.

 

La Chouannerie est donc une guerre civile politique et religieuse qui opposa Républicains et Royalistes.

 

 

LES ORIGINES DE LA CHOUANNERIE EN NORMANDIE Par Michel Vital le Bossé

 

La déclaration des droits de l’homme de 1789 est à la fois issue des clubs, des cafés et des salons tels celui de Sophie Volland ou de Madame du Delfand avec Voltaire.

 

Une aristocrate éclairée et une bourgeoisie libérale, des prêtres avant-gardistes fréquentent les « sociétés de pensées » ils deviennent ainsi les initiateurs des États Généraux et les inspirateurs des fameux « Cahiers de doléances » que noirciront de demandes et de suggestions les Vendéens alors que la première république a été proclamée en 1792.

 

Sous l’appellation de chouannerie, il faut distinguer plusieurs mouvements ou soulèvements celui de la Basse Normandie et le Bas-Maine avec le Comte Lois de Frotté et celui de la Bretagne de 1789 à 1815 et les terribles guerres de Vendée (Anjou, Bretagne, Poitou) qui entre 1789 et 1801 entraînent ces régions dans une tourmente qui va de la révolte au génocide avant que soit signée la paix.

Quel sens donner à l’appellation : CHOUAN ? Qu’est-ce qu’un Chouan ? Et qu’est-ce que la Chouannerie ?

En relisant « 93 » de Victor Hugo, une description précise nous est donnée d’un bocain vêtu d’un gilet de peau aux couleurs et motifs drapés et bigarrés, rappelant les peintures de guerre sur les corps nus des Pictons et des Naymnètes du Bas Poitou.

Le chapeau à larges bords tombe comme une feuille de rhubarbe sur un visage glabre inondé d’une longue chevelure, la culotte bouffante au-dessus des guêtres à boutons, les sabots sculptés à brides de cuir, le scapulaire au cœur rouge surmonté d’une croix cousue sur le gilet, le chapelet d’ivoire complètent ce portrait héroïque d’un insurgé qui, avec son fusil d’un autre âge, sa faux menaçante comme la Camarde, son cornet à bouquins pendant à la large ceinture donnent un air étrange à ce personnage d’un autre monde qui surgit dans la nuit au cri de la chouette, d’où il tire le nom de Chouan, lançant ce signal de rassemblement, les lèvres plaquées et le souffle puissant entre ses deux pouces joints.

Toute la chouannerie du nord de la Loire, du Maine, du Haut Anjou, de Basse et Haute Bretagne et de Basse Normandie tire son origine de la défense de la liberté, dont la liberté de conscience et de culte.

La Vendée est le prototype voire l’idéaltype de ces soulèvements que l’on appelle les « Vendées ».

La première insurrection en Normandie et Bas-Maine est conduite par Jean Chouan, né Cottereau, le 15 août 1782 lors de la première levée d’hommes de la convention au nombre de 100 000 hommes. Ce soulèvement n’est ni bourgeois ni aristocratique mais entièrement populaire.

En Vendée, les petits nobles et les hobereaux locaux en prendront la tête et deviendront « généraux » avec de simples gardes-chasses et des charretiers devenus chefs de guerre.

La cartographie des foyers insurrectionnels recouvre plusieurs régions de l’Ouest dont l’Orne et la Mayenne jusqu’à la fin 1784, lorsque les Vendéens atteignent Alençon et le Mans.

La Virée de Galerne se termine par un désastre humain suscitant d’autres soulèvements ? Mais la levée de 300 000 hommes en mars 1793 pour défendre la nation est déterminante pour l’histoire de cette contre-révolution vue du côté républicain.

Les hauts lieux de la Chouannerie Normande

Deux lieux sont à retenir du parcours de Frotté, le premier sa demeure alençonnaise sise à Darmigny (Orne), actuellement maison de retraite, le deuxième étant le château de Couterne en lisière de Bagnoles de l’Orne, propriété de son descendant le marquis Édouard de Frotté où l’on peut visiter un petit musée à la mémoire du chef de la Chouannerie normande et de l’armée catholique et royale de Normandie.

D’autres personnalités de même appartenance ornaise sont à mentionner : le baron Tanques dans le pays d’Argentan, Achard des Hautes Noës et le comte de Médavy près d’Argentan.

Rappelons la mise en demeure du Conseil civil et militaire de l’Armée Catholique et Royale en Normandie à l’adresse de Sa Majesté et sa haute responsabilité morale pour avoir « engagé ses fidèles et loyaux sujets à faire tous les sacrifices qui sont en leurs pouvoirs pour le rétablissement de l’Autel et du Trône ».

Ainsi parmi les figures de la chouannerie normande, le comte de Frotté occupe la place centrale équivalent à celle du Chevalier de Charrette pour la Vendée.

C’est en février 1800 après avoir échappé souventes fois aux Bleus, celui qui se faisait appeler Blondel, tombe dans le guet-apens de la rue du Pot d’Etain à Alençon, tendu par le général de brigade Emmanuel-Maximilien-Joseph Guidal, adjoint au général Chambarlhac pour le rétablissement de l’Ordre républicain sur le territoire de l’Orne.

Monsieur Michel Vital Le Bossé
Docteur en sciences humaines
Officier dans l’Ordre des Arts et des Lettres
Membre de l’Académie des sciences des Art et Belles Lettres